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Éditions Sulliver : Littératures actuelles

Une question nous est parfois posée quant à la volonté de créer, à travers la collection Littératures actuelles,  l’amorce d’une école littéraire.
Notre dessein se situe précisément à l’opposé. L’école littéraire est affiliation et répétition, quand nous rêvons d’une littérature sans attaches fixes et en constant renouvellement, chaque nouveau titre élargissant le champ des possibles.


Malheur à nous qui avons soumis le rythme à l’algorithme, nous qui avons refait le monde en roues en ponts et en fils à plomb, avons comptabilisé le vivant, aménagé le territoire et hiérarchisé l’intellect, nous qui avons institué en idiome dominant la langue mathématique et l’avons incitée à ensemencer le corps de notre poésie, malheur sur nous si nous demeurons prisonniers des tentacules de cette pieuvre opératoire, malheur sur nous si dans la nuit de notre raison nous ne sommes capables de faire leur part aux phares de la folie pour nous orienter vers de nouveaux ports.
André Bonmort, Corps sidéral

Au début, tonton Frédo bossait dans le réacteur principal. La couleur de l’eau des piscines d’entreposage, il dit toujours que c’est la pureté à l’état pur. C’est pour ça qu’il a arrêté, à cause de l’addiction. Il a tout de suite senti que s’il restait trop longtemps là-dedans, ça boufferait tout le reste, comme une putain qui suce trop bien comme il dit. On ne pense qu’à y redescendre, on trafique les chiffres du dosimètre. On triche à la visite médicale, on n’a plus que ça dans la tête et je peux comprendre. Ça n’est pas donné à tout le monde de risquer sa vie tous les jours je veux dire.
Sandrine Bourguignon, Nous sommes la meute pas le troupeau

Parfois, je n’y pense plus du tout. Pendant quarante-neuf secondes au moins. Je me suis chronométrée. Le reste du temps, ça peut poser quelques problèmes. Au travail, notamment. Tout va bien, tout est comme d’habitude, et puis d’un seul coup, j’ai des images de chairs mélangées qui me viennent dans la tête. Après c’est fini. Je reste comme ça pendant toute la journée, avec mon ventre qui brûle.
Sandrine Rotil-Tiefenbach, Karma X

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